Rappel de l’épisode précédent : Faire revivre des photos anciennes #0
Avant de commencer, je vais rapidement expliquer ce qu’est un tirage contact. Le principe est simple, on pose un négatif préalablement développé sur une feuille de papier sensible à la lumière, on insole la feuille et on la développe (révélateur, bain d’arrêt, fixateur, séchage). Dans notre cas, le négatif a une taille plus que raisonnable : 9*12cm. Pour un tirage de lecture uniquement, c’est largement suffisant (de toute façon, je n’ai pas pour l’instant d’agrandisseur permettant de tirer plus grand que le 6*9cm donc, ça règle la chose).
Après l’étape du tirage, on obtient le positif :
La qualité de conservation de ces plaques de verre laisse à désirer, je les ai nettoyées tant bien que mal mais la partie gélatine a subi les outrages du temps.
Pour les infos purement techniques, j’ai tiré les photos sur du papier Ilford Multigrade RC perlé, développé à fond dans du Dektol (enviro, 50 secondes) et fixé avec du Ilord Rapid Fixer, le tout avec un filtre de grade 3,5 parce que les plaques de verres manque cruellement de contraste. Malheureusement, j’ai eu la main un peu lourde sur les temps de pose et les noirs sont bouchés, et pour rajouter de la difficulté c’est plein de pétouilles car mon scanner est poussiéreux (promis la prochaine fois je le nettoie !) comme c’est ma première présentation, on me pardonnera.
Le seule information que j’ai pu trouver sur cette série c’est l’année :1904. Elle a été gravée sur une des plaques de verre côté gélatine pour être vue dans le bon sens, or, la personne qui a fait ça s’est ratée sur le 9 :
Elles ont été prises sur des plaques Lumière dont voici la boîte que vous avez déjà vu sur mon premier article :
Pour la technique, ce type de plaque ont une sensibilité entre 1 et 2 ISO, donc des temps de pose assez long, même si à l’époque, c’est de l’instantané !
Tout ça pour en arriver à notre communiante de 1904 :
Avant toute chose, la première question qui me vient à l’esprit est « qui est le photographe ? » Je suppute (j’aime bien ce mot !) qu’il s’agit du « patriarche » de la famille, pour deux raisons qui me paraissent évidentes. La première c’est qu’il n’apparait pas sur les photos. La seconde, c’est qu’à l’époque la grande majorité des photographes était des hommes.
On peut déduire que c’est un amateur, vu les poses qu’il fait prendre à son modèle (que nous verrons plus loin)
Ces photos s’inscrivent dans une période de retour à la foi en France, en effet, après la révolution française et le XIXème siècle qui ont été marqués par l’avènement des sciences et de la rationalité, ce renouveau se trouve être encouragé par les différents gouvernements de la 3ème République qui voit en la religion un facteur de stabilité (et un moyen de contrôler les foules ?)
On retrouve également à cette époque beaucoup d’image pieuse qui est un vrai style « la photographie de Grand Art » d’après Jabez Hughes (portraitiste Londonien) fait d’image moralisatrice et d’incitation à la foi. C’est un vrai fond de commerce pour beaucoup de photographes.
Dans ce contexte, la communion est une fête suffisamment importante pour que les photographes du dimanche l’immortalisent. Il ne faut pas oublier que c’est la première fois de leur vie que les communiants trouvent la voie. C’est une pratique sociétale forte qui se fait généralement en groupe.
On peut déduire que la nôtre vient d’une petite bourgeoisie de province, si l’on s’en réfère à la photo des femmes de la famille sur l’escalier de la (la leurs ?) maison, entourés de plantes en pots. Dans la série, on trouve aussi des photos de vacances, le prolétaire de l’époque ne pouvait pas aller se balader à la mer.
Elle pose avec ses poupées (sûrement en porcelaine vu l’époque) ce qui augmente fortement les chances qu’elle vienne d’une classe sociale élevée.
La plupart des négatifs de la boîte représente cette jeune fille qui pose dans son aube (qui ressemble plus à une robe de mariée qu’autre chose. D’ailleurs, j’ai cru au début que c’était une série sur une mariée, c’est le jeune âge du modèle qui m’a fait comprendre que ce n’était pas le cas.)
Le photographe lui a demandé de poser sous toutes les coutures, (profil gauche, profil droit, avec et sans le voile, debout, à genoux, je prie à gauche, je prise à droite…) pour qu’on voit bien la robe qui doit être du sur mesure et qui a dû coûter cher. Vu les poses qu’il lui fait prendre (à genoux en train de prier ou debout raide comme la justice) on peut facilement comprendre qu’il s’agissait d’un amateur – comme je le disais déjà plus haut – n’ayant pas la moindre idée de comment faire poser un modèle.
On peut se poser la question du choix de la faire poser devant cette tapisserie qui représente une scène (de bataille?) du moyen-âge. Quelle était l’importance de cette tapisserie ? Peut-être était-elle là pour montrer le pouvoir et l’argent? ce qui est quasi-sûr, c’est qu’il s’agit d’un objet assez cher. Je ne sais pas si c’est un original si c’en est une contemporaine à notre période, tissé, peinte. La mauvaise définition du négatif ne me permet pas de le déterminer. Un autre point, c’est que ce genre de tapisserie représentait deux choses : soit un fait historique, soit un fait biblique, il ne reste plus qu’à trouver lequel…
Et pour finir la série, on prend le grand père (qui me fait peur) en habits du dimanche et avec tous les accessoires de l’époque : chapeau, montre (? au bout de la chaine ?), moustache. Assis dans le jardin.
En bref, quelques photos de moments importants d’une famille bourgeoise car on ne sort pas l’appareil pour rien à cette époque là car les plaques sensibilisées ne sont pas données à toutes les bourses, même si cela tend à se démocratiser.
Les autres photos de la boîte en vrac :
Les ratées :
Autre vue:
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